ATELIER

MAITRE DE LA COULEUR

« La beauté du cœur transpire au-delà des apparences »

Depuis que Céline Roger vit à Sherbrooke, son espace de travail s’est modifié au fil du temps et, encore plus, depuis mars 2020 car son travail a pris un autre axe. De l’enseignement de groupe en présentiel, elle est passée à l’enseignement en ligne. Une nouvelle direction qu’elle n’avait pas vu venir. C’est l’arrivée inopinée de la pandémie qui a changé la donne. Elle devait s’adapter rapidement à cette situation sans précédent et c’est ce qu’elle a fait avec brio.

Son atelier est de taille moyenne et l’espace est suffisamment spacieux pour ses besoins actuels. « Mon atelier est divisé en deux parties par un demi mur et un rideau en plein centre. D’un côté, il y a mon lieu de création et ce que j’appelle mon studio d’enregistrement. De l’autre, il y a des bureaux, une filière, une étagère pour mes toiles et un meuble de rangement. J’ai donc deux belles superficies de 15 x 20 pieds et de 12 x 18 pieds. » (Ce qui fait environ 4,50 x 6 mètres et 3,60 x 5,40 mètres). L’artiste pense néanmoins réaménager pour gagner de l’espace et s’offrir un meilleur rangement pour ses toiles vierges et pour celles qui doivent partir en galerie. Depuis mars 2020, la carrière de Céline Roger a pris un chemin inattendu. « Ma carrière d’enseignante en art s’est complètement métamorphosée ». Cela lui a permis, pour ainsi dire, de se ré-approprier pleinement son atelier. « Avant, j’avais plein de chevalets et de tables partout pour mes élèves, mon matériel était constamment rangé (…), maintenant mon atelier me ressemble de plus en plus. C’est aussi mon studio d’enregistrement pour mes vidéos, ma formation et mes podcasts ».

Puisque son atelier est au sous-sol, la majorité du temps, elle travaille à la lumière artificielle. Depuis un accident au genou et deux opérations, elle ne peut plus se déplacer aussi aisément qu’avant. Sa pratique en a beaucoup souffert puisqu’elle était peintre de plein-air, travaillant sur le motif, à la lumière naturelle. Celle qui adorait peindre debout a dû changer ses habitudes. Bien qu’elle ne peint plus sur le motif autant qu’avant, la lumière naturelle reste néanmoins son choix de prédilection. « La lumière naturelle me stimule et m’inspire ! (…) Je me permets toutefois de faire du croquis en voiture, ce qui m’aide à être plus créative et moins près de la réalité. Avec la pandémie, j’ai développé beaucoup plus les textures et les techniques mixtes, mais je conserve mon médium favori qui est la peinture à l’huile ». Lorsque son sujet est à la lumière naturelle, l’artiste crée des oeuvres beaucoup plus douces et lumineuses. « Je remarque que j’ai tendance à utiliser des fonds plus foncés et que j’exagère beaucoup plus les ombres » quand elle travaille à la lumière artificielle. Il n’y a donc pas seulement l’environnement de travail qui a une incidence sur son travail, mais aussi la qualité de la lumière, l’espace disponible et sa condition physique. « Je suis directement influencée par mon rythme de création, lorsque je commence à manquer d’espace dans mon atelier. Dans ces moments-là, je peins moins et je fais plus de carnets de croquis, ou carnets créatifs, ou de petits formats ». Cet atelier qui était avant la pandémie un lieu de partage et de rencontres incessantes est devenu, au fil du temps, un refuge, un cocon plus calme. « Je peins toujours avec de la musique, seule, ou par le biais de la technologie. Je peins en ligne avec ma communauté (sur mon site web) ou lors de formations en compagnie de mes élèves ou avec d’autres artistes peintres professionnels lors de webinaires, etc. » Ce rythme de travail lui permet de mettre sur papier ou sur toile ses idées. Le rythme, plus lent qu’avant, lui permet aussi de peindre à tout moment, dès que l’envie se présente. L’artiste descend dans son atelier tous les jours. Elle peint en moyenne de 2 à 6 heures quotidiennement. Selon les saisons, le temps passé à sa pratique peut varier, notamment au printemps où il y a un regain d’énergie. Le fait d’enseigner a également un impact sur sa productivité. « Je constate que, sous peu, je pourrai consacrer plus de temps à mon art puisque mes horaires sont plus structurés et mon site en ligne de plus en plus complet. » L’artiste a un petit cérémonial qui l’accompagne dans sa pratique: Elle descend dans son atelier, met de la musique et cherche un sujet. Selon son état d’âme, elle choisit son médium. Son tablier fait partie de l’équation et s’ajoute au cérémonial de mise en place de l’état de créatrice. « Il me permet de me laisser aller et de ne pas me retenir »; un lâcher-prise nécessaire pour laisser libre cours à sa créativité. « Ce tablier, c’est comme une deuxième peau. Même en plein-air, je ressens le besoin de le porter avec mes espadrilles qui me donnent une impression d’avoir plus d’énergie ». Le vêtement et les accessoires ont donc leur importance symbolique. « Je me sens solide, groundée ! »

Céline Roger, qui est très à l’aise devant le public, trouve à cette expérience énergie et euphorie. Elle avoue néanmoins se sentir bien chez elle, dans le confort de son atelier où tout est à portée de main. « Depuis 3 ans, c’est la première fois de ma vie que je me sens autant chez moi. Pour l’instant, j’aime bien mon petit nid, qui est bien douillet, et adapté à ma réalité physique et technologique ». Bien qu’elle adore discuter quand elle est avec d’autres artistes, elle apprécie encore plus d’être seule avec ses élèves en ligne. Avant la pandémie, son atelier était ouvert au public. Maintenant, il est accessible sur rendez-vous seulement. Là où son atelier pouvait contenir bon nombre d’élèves à la fois, maintenant l’artiste ne reçoit qu’une ou deux personnes à la fois. L’affluence dans son atelier a donc beaucoup changé pour cette artiste professionnelle qui a débuté sa carrière par des symposiums en 2004. Céline Roger expose maintenant occasion-nellement dans des expositions régionales, nationales et internationales. Elle songe désormais à être représentée par une galerie, de façon permanente. « Je crois que les galeries sont un endroit idéal pour un acheteur. Je peux comprendre le désir du collectionneur de vouloir visiter le lieu de création de l’artiste mais, en même temps, si le lieu de création devient aussi une galerie, l’artiste sera sûrement limité dans le temps et l’énergie pour la création. Je pense que c’est relatif à chaque artiste de voir la formule qui lui convient le mieux, mais comme dit l’expression chacun son métier… »